
L’ORGANISATION JUDICIAIRE MONÉGASQUE - FOCUS SUR LA COUR DE RÉVISION par Lucien MAURIN
La Cour de révision est la juridiction suprême de l’ordre judiciaire monégasque.
Elle se situe au sommet de la hiérarchie des cours et tribunaux et veille à la bonne application de la loi et au respect des règles de procédure.
Elle contrôle la légalité des décisions rendues en dernier ressort par les juridictions inférieures.
Une spécificité propre au droit monégasque
Contrairement aux cours de cassation étrangères, la Cour de révision peut, après avoir annulé une décision pour violation de la loi, se renvoyer l’affaire et la rejuger au fond, autrement composée. Cette possibilité fait d’elle non seulement un juge du droit, mais aussi, dans certains cas, un juge du fond.
Cette caractéristique illustre la souplesse et la cohérence du système judiciaire monégasque.
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Fondements juridiques
Fondement constitutionnel
La Cour de révision tire son existence de la Constitution du 17 décembre 1962.
L’article 88 prévoit que « Le pouvoir judiciaire appartient au Prince. Il est délégué par lui aux cours et tribunaux. Les juges rendent la justice au nom du Prince. »
L’article 89 ajoute que les juges sont indépendants et ne dépendent que de la loi dans l’exercice de leurs fonctions. La Cour de révision exerce donc, au nom du Prince, une mission constitutionnelle de garantie de la légalité et de l’unité du droit.
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Organisation et fonctionnement
1. Composition
la Cour de révision comprend :
un président,
un vice-président,
et sept conseillers.
Les magistrats sont nommés par ordonnance souveraine, conformément à la loi sur l’organisation judiciaire. Ils siègent suivant l’ordre de leur nomination. La Cour ne peut statuer que si au moins trois de ses membres sont présents.Le Procureur général représente le ministère public devant la Cour. Le Greffe général du Palais de justice assure le secrétariat et la gestion des dossiers.
2. Procédure et fonctionnement
Le pourvoi en révision est la voie de recours qui permet de saisir la Cour. Il est formé par déclaration au greffe général, puis signifié à la partie adverse, accompagné d’une requête signée par un avocat-défenseur, exposant les moyens de droit.L’affaire est instruite par un magistrat rapporteur, désigné par le Premier président.
L’audience se déroule en trois temps :
lecture du rapport,
plaidoiries des avocats,
conclusions du ministère public.
La Cour délibère ensuite à huis clos et rend son arrêt dans un délai de trente jours après la clôture des débats. Elle peut aussi statuer hors session, selon une procédure écrite, pour les affaires urgentes.
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Compétences et pouvoirs
1. Compétence générale
La Cour de révision statue pour :
violation de la loi,
excès de pouvoir,
ou inobservation des formes substantielles prescrites à peine de nullité.
Elle est saisie de pourvois formés contre les décisions rendues en dernier ressort et passées en force de chose jugée, quel que soit le domaine concerné.
2. En matière civile, commerciale et administrative
La Cour connaît des pourvois contre les arrêts de la Cour d’appel et les jugements du Tribunal de première instance statuant en dernier ressort.
Elle peut :
rejeter le pourvoi,
annuler la décision attaquée,
ou rejuger l’affaire elle-même, autrement composée.
Elle statue aussi sur :
les pourvois dans l’intérêt de la loi, formés sur ordre du Directeur des services judiciaires et réquisition du Procureur général ;
les pourvois pour excès de pouvoir des juges;
et les demandes en reprise de procès après un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme.
En matière administrative, la Cour demeure compétente pour le contentieux de la responsabilité de l’État et des administrations publiques, tandis que le Tribunal suprême est seul compétent pour le contentieux de l’excès de pouvoir (article 90 B de la Constitution).
3. En matière pénale
Elle connaît des jugements et arrêts rendus en dernier ressort, en matière criminelle, correctionnelle ou de police, lorsqu’ils sont entachés :
de violation de la loi,
de violation des règles de compétence,
ou d’inobservation des formes substantielles garantissant la régularité du jugement et les droits de la défense.
La procédure est essentiellement écrite : la Cour statue sur pièces, sans débat au fond. Elle peut rejeter, annuler, ou renvoyer l’affaire à une autre formation pour qu’elle soit rejugée. Si la juridiction de renvoi méconnaît son arrêt, la Cour peut annuler pour excès de pouvoir et statuer elle-même.
Elle connaît aussi :
des pourvois dans l’intérêt de la loi ;
- et des demandes en reprise de procès pour erreur de fait.
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Les effets des décisions
Les arrêts de la Cour de révision ont autorité absolue de chose jugée. Ils sont définitifs et s’imposent à toutes les juridictions de l’ordre judiciaire.Aucun recours ordinaire ou extraordinaire n’est possible.
Lorsqu’elle annule une décision, la Cour peut :
renvoyer l’affaire à une autre formation,
ou la rejuger elle-même.
Ses arrêts, rendus au nom du Prince, assurent la stabilité du droit, la cohérence de la jurisprudence et la protection des droits fondamentaux des justiciables.
Lucien MAURIN
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