NOVADROITS - LA REVUE DE PRESSE : 14 OCT - 21 OCT 2024
L’association Novadroits, spécialisée dans l’accès au droit et l’entraide étudiante, vous présente la revue de presse du 14 au 20 octobre 2024. Chaque semaine, notre association synthétise des informations juridiques essentielles dans l’objectif de vulgariser le droit afin de le rendre accessible à toutes et à tous.
A la une : Le Premier ministre, Michel Barnier, souhaite une "maîtrise des dépenses" de l’Aide médicale d’État
Le Premier ministre, Michel Barnier, souhaite une "maîtrise des dépenses" de l’Aide médicale d’État (AME), destinée aux étrangers en situation irrégulière, comme il l'explique dans le Journal du dimanche du 20 octobre 2024.
Interrogé sur la nécessité de revoir cette aide, il ne semble pas en faveur de sa suppression, mais prône un contrôle strict des dépenses : “Le gouvernement et le Parlement prendront toutes les dispositions pour que ces dernières ne progressent plus”. Il insiste sur le fait que l'AME doit rester un "outil de santé publique", et ne doit jamais être détournée de son objectif.
Créée par la loi du 27 juillet 1999 (articles L.251-1 et suivants du Code de l’action sociale et des familles), dans le cadre de la création de la couverture maladie universelle (CMU), l'AME permet aux étrangers en situation irrégulière d’accéder à des soins, sous conditions de résidence et de ressources.
Les conditions principales pour bénéficier de l'AME :
1. Résider en France depuis plus de 3 mois,
2. Ne pas avoir de titre de séjour depuis plus de 3 mois,
3. Avoir des ressources inférieures à un plafond (ex. 810 euros par mois pour une personne seule),
4. Les enfants mineurs ont droit à l'AME sans délai, même si la condition des trois mois n'est pas remplie.
L’évolution récente de l’AME:
1. 29 décembre 2003 : le Conseil constitutionnel valide le délai de trois mois pour bénéficier de l’AME pour les étrangers.
2. 28 décembre 2010 : introduction d’un forfait de 30 euros pour accéder à l’AME (supprimé en 2011).
3. 28 décembre 2019 : la loi introduit un délai de neuf mois pour certains soins non urgents.
4. 27 décembre 2019 : le Conseil constitutionnel valide ce délai plus restrictif de neuf mois.
5. 1er février 2023 : dépôt du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration.
6. 7 novembre 2023 : le Sénat adopte la suppression de l’AME et le remplace par une « aide médicale d’urgence » qui réduit drastiquement le panier de soins remboursés. Toutefois, cette mesure est supprimée par la commission mixte paritaire, de sorte qu’elle ne figure pas dans le texte définitivement adopté par le Parlement et promulgué le 26 janvier 2024.
7. 25 janvier 2024 : le Conseil constitutionnel censure en partie le projet de loi en vertu des articles 39 et 44 de la Constitution dont le délai de cinq ans pour l’accès à certaines aides sociales.
8. 11 avril 2024 : le Conseil constitutionnel réaffirme l’importance du droit à la protection de la santé dans le cadre du débat sur la réforme de l'AME.
9. 9 juin 2024 : le président de la République annonce la dissolution de l'Assemblée nationale, en application de l'article 12 de la Constitution.
10. Aujourd’hui, le débat sur l’AME est réouvert par le nouveau gouvernement.
Les chiffres sur l’AME:
L'AME couvre 100 % des soins médicaux et hospitaliers dans la limite des tarifs de la Sécurité sociale En 2024, l’AME représente environ 0,5 % du budget des dépenses de santé, avec 466 000 bénéficiaires en 2023.
La Cour de cassation rejette la réhabilitation d’un condamné à mort
Pour la première fois, la Cour de cassation s’est prononcée sur la demande de rétablissement de l’honneur d’une personne condamnée à la peine de mort et dont la peine a été exécutée. Cette demande est rejetée par l’arrêt du 15 octobre 2024 (n°23-81.968) compte tenu de l’insuffisance des gages d’amendement présentés par le condamné avant son exécution.
En 1954, un homme a commis un vol à main armée à Paris. Dans sa fuite, il a tué par arme à feu un fonctionnaire de police, a blessé à la nuque un passant et a fait usage de son arme à plusieurs reprises sur des passants.
En 1957, l’accusé a été condamné à mort pour violences volontaires sur un agent de la force publique, tentatives de meurtre et vols qualifiés. Son pourvoi en cassation et son recours en grâce ont été rejetés. En 2018, son fils a déposé une requête en réhabilitation judiciaire.
La requête en réhabilitation
Une personne condamnée pour un crime peut, à certaines conditions, être réhabilitée lorsqu’elle a montré des gages d’amendement après l’exécution de sa peine. La réhabilitation entraîne l’effacement de la condamnation.
La requête en rétablissement de l’honneur
La loi du 24 décembre 2020 a ajouté un article 2 à la loi du 9 octobre 1981 portant abolition de la peine de mort. Cet article prévoit que les ayants droit d’une personne condamnée à mort et dont la peine a été exécutée peuvent saisir la chambre criminelle de la Cour de cassation d’une requête tendant au rétablissement de l’honneur de cette personne.
Mbappé accusé de viol en Suède
Kylian Mbappé est accusé d'avoir commis un viol en Suède. Après le mouvement #MeToo en 2017, la Suède a modifié sa législation en matière de viol à compter du 1er juillet 2018.
Contrairement à la loi française, la Suède a introduit la notion de "viol par négligence", qui implique que tout acte sexuel sans consentement explicite, même en l’absence de violence ou menace, est considéré comme un viol. Si le consentement n’est pas clairement exprimé, le suspect peut être poursuivi.
Dans le cas de Mbappé, il devra prouver que la plaignante a explicitement consenti à l’acte sexuel, par exemple via des SMS ou l’enregistrement d’une conversation téléphonique. Le joueur risque une peine de six ans d’emprisonnement s’il est reconnu coupable des faits. Pour l’heure, il est présumé innocent.
Selon l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’Homme “Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie”.
Le Conseil constitutionnel renforce la protection du droit au silence
Par une décision rendue le 18 octobre 2024 (n° 2024-1108 QPC), le Conseil constitutionnel étend le droit au silence aux magistrats professionnels devant les juridictions disciplinaires.
À l’occasion d’une procédure disciplinaire engagée à l’encontre d’un membre professionnel du corps des chambres régionales des comptes, le Conseil constitutionnel a reconnu le droit pour le magistrat poursuivi disciplinairement d’être informé de son droit de se taire par le rapporteur au cours de la procédure.
En vertu de l’article 9 de la DDHC de 1789, le Conseil constitutionnel élargit la protection des droits fondamentaux des individus et garantit le droit pour le requérant de ne pas s’auto-incriminer du fait de ses déclarations. Par conséquent, dès lors qu’un professionnel fait l’objet de poursuites, même disciplinaires, il doit nécessairement être préalablement informé de son droit de se taire avant de pouvoir être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés. Toutefois, le Conseil accompagne sa décision d’inconstitutionnalité avec un effet différé, permettant ainsi aux autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires pour ajuster la législation en vigueur.
L’article 9 de la DDHC : « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ».
L’Allemagne face à la crise migratoire
Depuis le 16 septembre 2024, l'Allemagne a rétabli le contrôle de ses frontières terrestres pour une durée de six mois. Le Gouvernement allemand entend lutter contre l'immigration clandestine et renforcer la sécurité intérieure du pays selon la ministre fédérale allemande de l’Intérieur Nancy Faeser. Cette mesure fait suite à plusieurs attaques terroristes ayant eu lieu sur le territoire, notamment le 23 août dernier à Solingen, une attaque au couteau perpétrée par un demandeur d’asile syrien ayant tué trois personnes.
Si cette décision semble perturber l’équilibre de l’espace Schengen, le droit européen autorise la dérogation à la libre circulation en autorisant le contrôle temporaire aux frontières pour une durée de 6 mois reconductibles, en cas de circonstances exceptionnelles. Cette autorisation a été étendue le 24 mai 2024, par une réforme du code Schengen permettant la réintroduction et la prolongation des contrôles aux frontières intérieures en cas de menace grave pour l'ordre public ou la sécurité intérieure, pour une durée maximale de deux ans, renouvelables un an. Cette décision semble provoquer des tensions avec ses voisins européens. L’Autriche a affirmé ne pas être prête à accueillir les migrants qui seraient refoulés à la frontière allemande.
L'espace Schengen est un espace de libre circulation des personnes. Au sein de cet espace, il n'y a pas de contrôles aux frontières intérieures. Les ressortissants des États de l'espace Schengen peuvent traverser la frontière qui sépare deux États de l'espace Schengen sans être soumis à un contrôle. Les États de l'espace Schengen partagent une frontière extérieure commune. En 2024, l’espace Schengen regroupe 29 Etats dont la Bulgarie et la Roumanie, ayant intégrés cet espace le 31 mars 2024.
Sources :
EXCLUSIF - Michel Barnier : budget, immigration, climat sous tension
Chapitre Ier : Droit à l'aide médicale de l'Etat. (Articles L251-1 à L251-3) - Légifrance
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Communiqué: Demande de rétablissement de l’honneur d’un condamné à mort | Cour de cassation
Kylian Mbappé : ce que l'on sait de l'enquête pour viol ouverte en Suède - France Bleu
En Suède, la très stricte législation qui punit le viol
Décision n° 2024-1108 QPC du 18 octobre 2024 - Décision de renvoi CE | Conseil constitutionnel
Immigration : le durcissement allemand provoque des débats tendus en Europe
Schengen : guide de l'espace européen sans frontière | Thèmes | Parlement européen
Rédaction : Jérémy FLORENT et Sheryl BERTRAND