JURISCAP - CLAUSE D’EXCLUSION, DROIT DE VOTE DE L’ASSOCIÉ ET LIMITES DE LA LIBERTÉ STATUTAIRE
Est-il possible pour les associés d'une SAS de prévoir dans les statuts que l'associé concerné par une proposition d'exclusion ne puisse pas voter ?
⚖ Non. La Cour de cassation a précisé dans son arrêt du 29/05/2024 "que si les statuts d'une société par actions simplifiée (SAS) peuvent prévoir l'exclusion d'un associé par une décision collective des associés, toute stipulation de la clause d'exclusion ayant pour objet ou pour effet de priver l'associé dont l'exclusion est proposée de son droit de voter sur cette proposition est réputée non écrite." (Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 mai 2024, n° 22-13.158)
Ce qu’il faut retenir sur l’exclusion d’un associé :
Sauf exceptions prévues par la loi, seuls les associés ont un droit de vote. Une fois la qualité d'associé obtenue, l'associé a le droit de rester dans la société aussi longtemps que celle-ci existe (Cass. com., 12/03/1996, n°93-17.813).
La loi ou les statuts peuvent envisager l'exclusion de la société d'un associé :
(1) La loi : par exemple lorsqu’un actionnaire n'a pas libéré l'intégralité de ses apports en numéraire ou encore lorsqu’une procédure collective l’impose.
(2) Les statuts : Les statuts constituent le contrat de société, encadrant les relations entre associés ainsi que celles entre les associés et la société elle-même. Ils possèdent une force obligatoire, similaire à tout autre contrat. On peut y insérer une clause d'exclusion (ex : en SAS et SNC). La clause d'exclusion permet de contraindre un associé à céder ses droits sociaux, notamment lorsqu'un événement préalablement défini se produit. L'exclusion peut être automatique lors de la survenance de cet événement ou subordonnée à la décision d'un organe social, l'assemblée générale des associés. Il y a un fort intérêt à stipuler dans les statuts une telle clause dans la mesure où elle peut permettre de préserver les intérêts de la société d'un comportement susceptible d'être à l'origine d'un litige futur ou encore de permettre d'agréer de nouveaux entrants.
Une telle clause est valable sous certaines conditions :
*Cette clause doit avoir été acceptée par tous les associés soit dans les statuts d’origines (lors de la création de la société), soit en cours de vie sociale par décision prise à l'unanimité (CA Grenoble, 16/09/2010, n°10-62).
*Elle doit encore préciser les conditions dans lesquelles l’associé peut être tenu de céder ses actions, dont l’organe compétent pour décider de l’exclusion et le motif d’exclusion déterminé à l'avance, lequel doit être conforme à l’intérêt de la société et l’ordre public (Conseil Constitutionnel, 09/12/2022, n°2022-1029, QPC pts 9 et s.).
* Le principe du contradictoire est respecté lors de la prise de décision.
*L'associé exclu doit obtenir le remboursement de ses droits sociaux. En effet, un associé ne saurait être exclu sans indemnisation.
* Si la décision d’exclusion résulte d’une décision des associés, l’associé dont l’exclusion est demandée doit pouvoir participer à la délibération en votant sa propre exclusion (art. 1844 al 1 code civil, Cass. com., 09/07/2013, n°11-27.235).
Sur ce dernier point la jurisprudence est venue préciser que la clause qui aurait pour objet ou pour effet de priver l’associé de son droit de vote doit être intégralement réputée non écrite. Dans cette affaire, il s’agissait d’une clause qui stipulait que l’associé dont l’exclusion est soumise au vote peut certes participer au vote, mais que ses voix ne seront pas prises en compte dans le calcul de la majorité (Cass. com., 09/07/2013, n°11-27.235 - Cass. com., 21/04/2022, n°20-20.619).
Dans l’affaire commentée du 29/05/2024, la Cour de cassation vient préciser que dorénavant, ce n’est pas la clause dans son intégralité qui est réputée non écrite (cad sans aucun effet), mais seulement la stipulation litigieuse de la clause.
-- Il faut comprendre que l’associé visé par l’exclusion a le droit de participer aux décisions collectives et de voter.
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Gihen Ben Ziadi – Juriscap